Historique des rickman

Ecrire… Rien de plus facile qu’écrire , lorsque l’on n’est ni journaliste, ni spécialiste, quelques lignes sur un homme, une marque, une moto: sur Internet, vous tapez RICKMAN, et fort aimablement, « l’immonde créature » vous sort ….37200 entrées !
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Qu’elle est belle la modernité !
Catastrophe! Vous passez quelques heures à contempler les photos, les commentaires souvent indigents, souvent mal traduits, et toujours la même rengaine « le cadre, le cadre, le cadre.. » et rien sur les deux hommes, DON et DEREK RICKMAN.

Retour donc au point de départ !
Je pioche donc dans mes « réserves », appelle à l’aide des gens du forum compatissants ( ils se reconnaîtront), parcours moult revues et sites, catalogues et presse spécialisée anglaise ( voir bibliographie). Et voici le résultat….
(Les puristes corrigeront avec indulgence les multiples erreurs, imprécisions et commentaires personnels. Je précise que je n’ai pas consulté le livre Rickman, non traduit, que l’on peut se procurer par Internet : « C’eût été trop facile ! »)
Ce qui suit est destiné à motos-anglaises.com pour y distraire ses adeptes.
Mon bon René, je commence !

Ce qui m’a particulièrement surpris et enthousiasmé pendant ces recherches, c’est le parcours de ces deux frères : leur opiniâtreté, leur réactivité, l’ampleur de leurs connaissances, et leur fibre commerciale… La partie technique est connue, elle mériterait aussi qu’on s’y arrêtât un peu plus.

Premiers souvenirs en 1969 ….1000kms du Mans…
Un Anglais roulait en RICKMAN… pourquoi ce nom allait-il rester gravé dans les mémoires ? Le cadre, certes innovant pour l’époque ? Le nom ? Cette peinture verte mythique ? Allez donc savoir quand on a 20 ans !

Mais reprenons !
Au moins ces deux-là n’ont pas eu à subir l’opposition parentale. Leur père Ernie Rickman fonde, avant la guerre, un garage automobile dans le sud du Hampshire et comble de bonheur pour les deux garçons, il était un des membres du Southampton Saints Speedway Team et n’hésitait pas à emmener son fils Derek le voir courir….heureux enfant !
Pendant la guerre, le père monte un commerce de transport routier et se procure une BSA B32 pour rouler en trial….
Et les deux frères deviennent apprentis mécaniciens….

 

Derek reprend la B32, pour déjà se lancer dans les » Scramblers Meetings » fort nombreux en GB à cette époque. Son talent en surprend déjà plus d’un (1949) et Derek affronte déjà des stars telles Eric Cheney.


Cet apprentissage intensif préfigure les succès qu’il aura bientôt avec ses propres machines.

Don et Derek, après la disparition de leur père, gèrent le garage, commencent à courir régulièrement en trial sur des BSA Goldstar, et vont même gagner, lors du “Sunbeam novices” la récompense suprême, le podium.
Les courses s’enchaînent sur Royal Enfield 250 et en Goldies, leur marque préférée, semble-t-il.
Bien évidemment, ils rêvent de se confronter aux pointures européennes et sur des terrains inconnus…mais….ils se rendent vite compte qu’ils ne font pas le poids face à des machines spéciales comme les Lito, Monark, Husqvarna.
Que faire ?

Ils vendent le garage en 1956, ouvrent un magasin de pièces détachées et ainsi vont pouvoir consacrer une partie de leur temps à mettre en œuvre : » LE SCRAMBLER IDEAL », la première version Rickman : Triumph Twin (T110), cadre BSA, fourche Norton, qu’ils appellent la Tri BSA (en fait la première Rickman Métisse).

 

 

Cette machine redoutable remporte plus de 60 victoires avant d’être battue.

 

Métisse : hybride, croisement, bâtarde, à vous de choisir !

C’est le début de la gloire, puisque Derek est sélectionné par le British MotoCross des Nations, et pendant 10 ans, il participe à ces courses. C’est aussi à cette époque qu’apparaît la couleur verte de leurs motos ainsi que leur logo.

 

 

 

Gênés par l’usure de leur équipement en course, ils ont le coup de génie de s’adresser à Doug Mitchenall de Avon Fairings, spécialiste des équipements en plastique, pour créer leur première « ligne personnelle »…. La célèbre MK2 est née !

 

Don gagne en individuel en 1959 le MotoCross des nations à Namur en Belgique.
Pour toutes les victoires des deux frères, voir fin d’article, bibliographie.

Toujours inventifs et perfectionnistes (la MK2 n’étant pas exempte de défauts), ils créent une machine complète, la MK3 (1961), cadre Reynolds 531 (et oui, le voilà !) qui sert de réservoir d’huile, frein au diamètre plus large….
Je me permets de rappeler qu’en 1880 (aucun rapport avec Rickman), une moto fabriquée par Hildebrandt et Wolfmüller contenait dans les tubes de son cadre de l’huile de graissage.


Les deux frères contactent ensuite les grands de l’époque: BSA, Matchless et Triumph qui….ne voulurent rien savoir (peur de la concurrence?, nécessité de vendre leurs propres motos ?).


Et c’est la création de leur propre entreprise, joli succès d’ailleurs, trois machines par semaine sortent de leur atelier, pour un sport certes populaire, mais fortement concurrencé.

 

Ils sont ultérieurement contactés par Bultaco, qui veut lutter contre les CZ et autre Husqvarna. L’affaire se conclut, les deux frères partent en Espagne et transforment le Bultaco de route en cross (1965 = Bultaco Métisse). Don gagnera le GP de Barcelone sur cette nouvelle machine.


Joli succès suivi d’un coup de maître : ils deviennent concessionnaires britanniques Bultaco pour les machines route et cross, avec notamment la 203 cm3 « the petite métisse », ainsi que la 250cm3 (3ème au British GP à Shrubland Park.

Ces Bultaco connaissent un énorme succès en Amérique. (Ce succès pourrait expliquer l’abandon d’Ariel par Sammy Miller,au profit de la Métisse ). Notons qu’en 1964, 50% des motos tous terrains sont des Rickman Métisse.
.

 

Les deux frères essaient à nouveau de contacter les grandes marques et essuient un nouveau refus, sauf de la part de Matchless ( leurs moteurs commencent-ils à peiner ?) ——–>

 

Que peuvent alors faire les Rickman, si ce n’est utiliser des moteurs de Triumph…. d’occasion !


Ce qui n’ empêche pas Don en 1966 de gagner devant John Smith (champion du monde ?), à Farley Castle.

Et pourquoi ne pas s’attaquer à de plus grosses cylindrées ?

 

Les années qui suivent voient l’apparition des 650 Triumph et 600 Matchless (motos déjà utilisées aux USA). Derek est le premier vainqueur sur le Mono, pendant que Don tourne sur le Twin.

En 1965, un journaliste de la presse spécialisée présente les Rickman à Tom Kirby, qui désire une « Road Race version », pour sa 7RS et sa G50S.
Bill Ivy utilisera d’ailleurs une des Rickman Métisse lors des British Championship séries.

 

L’aventure continue….. avec de gros problèmes à régler en perspective, pour ce nouveau type de motos (route et course) : géométrie différente du cadre, nouvelle fourche,frein hydraulique à disque sur les deux roues ( première fois que cette innovation faisait son apparition en Europe ?) , coopération avec Lockheed, création du frein si particulier à l’avant et bras oscillant super rigide…

Succès immédiat, deuxième place d’Alan Barnett en 1969 aux Senior TT derrière Ago.
Ago utilise d’ailleurs une Street Métisse pour ses déplacements personnels sur l’île de Man : excellente publicité, au demeurant !.


Ces premières motos utilisent avant tout des moteurs Triumph, mais n’oublions pas la splendide Royal Enfield Interceptor, mettant particulièrement en valeur le moteur (voir photo et bibliographie).

Rickman Triumph au Bol d’Or

Interceptor

Weslake 500

Le “kit” Rickman

URS

Suzuki

 

 

Les Rickman continuent de s’intéresser au cross et la MK4 succède à la MK3 ; elle utilise la même géométrie du cadre mais avec un bloc moteur BSA ou Triumph.

 

 

Leur entreprise prospère alors si bien qu’à la fin des années 60, trente ouvriers sont employés et 25 châssis sortent de l’atelier chaque semaine.

Mais les Japonais rôdent et apparaissent comme une menace sérieuse.
BSA et Triumph (branche américaine) approchent les frères Rickman pour fabriquer des motos de loisir, de petite cylindrée et c’est l’épopée …des Zundapp qui commence et ces machines deviennent de plus en plus populaires aux USA.


En GB en 1975, fut d’ailleurs présentée « the Rickman Army Micro » équipée d’un moteur Zundapp, mais que le Ministère des Armées ne retient pas….En revanche, la « police Métisse » équipée d’un Twin Triumph est retenue.


Nouveau projet, nouvelle étape et construction d’une usine 6 fois plus grande….les deux frères se consacrent à plein temps à leur usine : 4000 unités par an et 90 % de la production vers les USA ….pour atteindre 1200 unités en 1970 !!! (Zundapp et 250 Montesa)

 

 

 

 

 

 

 

 

La gamme Rickman est maintenant extrêmement complète et reçoit les éloges de la presse (article sur le London show 1972).

Ils reçoivent d’ailleurs le Queen’s award to Industry en 1974.


L’équipe britannique remporte de plus en 1974 aux ISDT 3 médailles d’or et 1 d’argent

Mais catastrophe….l’importateur américain se retire et les ventes chutent !

 

Petit retour en arrière: en 1968 ils signent un contrat avec Westlake…pour développer » le Huit Soupapes , utilisé tout d’abord pour la course , le side car, le cross….(ce modèle sera même adopté par la police !!! (imaginez !!!!)


En 1970, les frères s’attaquent à un prototype 7OOcm3 :vilebrequin d’une seule pièce , bielles en acier spécial, boîte quaife, 76 ch. à 8000 tours ….le tout pour 140 kg ! Percy Tait « essayeur chez Triumph qui a procédé aux essais à Thruxton pense que cette machine est aussi rapide que le 3 cylindres type Daytona » ( extrait moto revue sept 70)

Et l’aventure sur piste et sur route prend un nouvel élan !

En 1972 les deux frères avec RGM développent la Rickman CR (officiellement compétition – client, souvent appelé café racer (?) ) et produisent jusqu’à 6O châssis par semaine
C’est à cette époque que l’on découvre , à mon sens, un autre aspect du génie des deux frères : face à l’effondrement du marché anglais et à la montée en puissance des japonaises, ils proposent un cadre DE QUALITE pour y loger leur moteur : CR750 Honda,CR900 Kawasaki, Horex, Aermacchi et combien d’autres… (voir photos).

Certes ce ne sont pas les seuls à faire des cadres ((Egli, Martin, Seeley) à cette époque, mais ce sont ceux qui commercialisent la gamme la plus large.

 

Ils doivent cependant pallier le problème de l’effondrement de l’équipementier « Avon Fairings », ce qui les poussent à développer LEUR propre gamme d’accessoires , casques ,« top case » (250 colis expédiés par jour ). Ils deviennent le plus grand producteur d’équipement d’Europe, fournissant même les marques japonaises ! (si, si !)


Bien sûr nos bons amis du soleil levant réagissent vite et leurs motos débarquent bientôt …..tout équipées !!! ce qui provoque l’écroulement du marché !

 

Les frères réagissent ( de nouveau !!!)et se tournent vers la bicyclette BMX, qu’ils abandonnent assez vite pour se tourner vers un marché plus porteur en 1988 : la voiture !

 

La voiture , certes , mais pas n’importe laquelle : châssis spéciaux, utilisation de la fibre de verre (photo) Rickman ranger , Camping car , pick-up et …… voiture de sport (base Ford Sierra):

Passons sous silence une malheureuse tentative d’expansion vers la Russie et la vente de l’usine en 1992.

 

A 70 ans les frères ont peut être mérité une retraite heureuse et on peut les imaginer contemplant leurs machines pilotées par ceux…….qui roulent encore avec !

Et voilà le résumé de la saga Rickman achevée .

Devant ces passionnés , ces novateurs, précurseurs , mécaniciens, habitués des podiums, managers……

CHAPEAUX BAS, MESSIEURS !
Jean christ

 

Documents annexes:

Présentation de la Rickman Interceptor (Moto Revue mars 1970)

Documentation sur la fourche Rickman CR par RGM motors

Documentation RGM motors sur les réservoirs

Améliorations pour les cadres Rickman par RGM motors

Extrait du catalogue d’équipements Rickman

Mes sources :
Sur le net : tapez rickman et ….bon courage !


Toute les victoires des frères : sur le site du club allemand , agréable à parcourir .

Des revues anglaises (non traduites) : Classic bikes(janv. 92) Motor cycle (juillet 97) merci the single et bien d’autre numéros surtout trial cross
Moto revue (1970 , 1969) n 1970 pour la Royal.Enfield Interceptor
Moto légende mars 2003 (essai) route
Moto légende n 1 cross et route
Photos personnelles ou « prise « sur le net….remerciements
Des photos envoyées par des motards du forum
5 coups de fils en GB pour plus de renseignements

pièces , cadre…..sont toujours fabriqués (voir net ou forum spécialiste !


A lire bien évidemment le livre sur ‘Rickman » mon prochain cadeau ! (non traduit)

Merci à Claudine et Bertrand pour la mise en page.

JC DIT Rickman

le 9 avril 2007

 

http://motosfrance.free.fr/rickman.html

 

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