Jivaro a écrit :Qu'est ce que tu veux que l'on y fasse, mon pauv' Germain ! Rappelle toi le dernier article sur l'atelier. On y voit une Vincent, la transmission primaire ouverte, et la légende dit: Une Vincent, la boite ouverte. J'avais demandé à lire les légendes, même pas l'article, avant parution...
C'est typique des trucs qui mettent en rogne... mais faut savoir qu'entre le rédacteur initial de l'article et le lecteur qui ouvre son magazine, y'a toute une chaine d’intermédiaires qui peuvent gâcher, souvent sans s'en rendre compte, un bon travail au départ.
Partons de l'idée que le rédacteur sache à peu près de quoi il parle... mais déjà, admettons qu'il n'est lui même pas un spécialiste de tel ou tel modèle et si il fait bien son boulot de journaliste, il en apprendra autant en écrivant son papier que ce qu'il espère apprendre au lecteur. Mais aussi consciencieux soit-il, ce journaliste n'est pas un prof, pas un savant ni un ingénieur et parfois, pas un mécanicien. Il est journaliste et si il écrit dans des journaux de motos, c'est généralement qu'il aime ça et qu'il pratique lui-même, ce qui est déjà pas mal. Mais bon, journaliste, c'est un métier et mécanicien, c'est un autre métier (l'un et l'autre peuvent très bien s’apprendre sur le tas et l'expérience vaut autant que l'instruction théorique). On peut savoir un peu des deux, mais ce n'est pas si courant. S'il écrivait comme un ingénieur ou un prof, ça pourrait devenir très chiant et plus personne n'achèterait ce journal.
Bref, le journaliste remet son papier (il a travaillé soit sur sa propre proposition, soit sur commande). Dans le meilleur des cas, il remet aussi les photos (les siennes ou celles du photographe, ce qui est aussi un métier) agrémentées de ses propres légendes. Une légende photo permet d'expliquer l'image et d'apporter des compléments d'information qu'on n'a pas mis dans le texte de l'article, souvent pour fluidifier, pour que ça reste agréable à lire... ici, je rappelle qu'un article n'est pas une thèse universitaire ni un ouvrage savant. Un article, c'est une transmission d'informations écrit d'une manière où on se place dans un contexte de proximité et de complicité avec son lecteur, du moins est-ce ainsi dans nos domaines de "passion".
Des fois, le rédacteur remet son "papier" séparément par rapport au photographe qui rapporte ses images de son côté... il est même assez fréquent que l'un et l'autre n'aient pas bossé ensemble, voire même que le rédacteur ne voit pas du tout les photos qui vont accompagner son papier. Dans le secteur très dur de la presse "loisirs" (en crise, comme vous le savez), les articles sont plus souvent écrits par des pigistes que par des journalistes "en poste" et permanents de la rédaction.
Ensuite, un secrétaire de rédaction (le SR) relit l'article qui doit être conforme à la commande, en longueur, en "encadrés" éventuels : portrait du proprio de la bécane ou de l'artisan, rappel historique, fiches techniques, etc...
Si c'est trop long, le "SR" coupe au mieux et là, y'a une première éventualité que des erreurs techniques sur le sujet traité soient commises, car quand on "coupe" un texte, faut raccommoder, revoir des tournures de phrases, etc... si le SR est sérieux, il va en informer le rédacteur et ils en reparleront ensemble. Parfois, le SR aimerait bien faire ça sérieusement, mais le temps lui manque, y'a un bouclage à tenir, d'autres papiers à voir, des feuillets qui partent déjà à la presse... et puis le rédacteur n'est peut-être pas joignable dans la demi-journée où le SR traite son papier.
Bref, ça part ensuite pour relecture au rédac-chef adjoint ou au chef de rubrique... lui, il relit l'ensemble et voit si ça tient la route, si c'est lisible par un lecteur lambda. Déjà là, si il y a une erreur technique ou une approximation malheureuse, le chef de rubrique ou rédac'chef ne la verra peut-être pas.
Et les légendes-photos, si souvent imprécises et même parfois bidonnées après-coup qui nous énervent tant, nous autres lecteurs ? Au montage, une photo sélectionnée par le rédacteur ne convient plus à la maquette... et le maquettiste en prend une autre, comme il peut, où il peut... y'a pas de légende à cette photo là ? Merde alors ! Que faire ? Le rédacteur n'est pas joignable et le boulot doit avancer quand même... alors ça se démerde, on appelle machin "qui s'y connait" en vieux brêlons, il a une anglaise, il doit savoir... des fois, "machin" est contacté par téléphone. Combien de fois ai-je été appelé (parfois dans la soirée) pour des articles écrits par d'autres pour savoir si tel modèle (au téléphone !) a deux carbus ou un kick ou un truc ici ?
Combien de fois ai-je moi-même appelé un pro que je connais (Jivaro pourra d'ailleurs le confirmer) pour obtenir une précision sur tel ou tel question technique ou historique concernant un article auquel je n'ai rien à voir ? Et encore quand ça se passe comme ça, c'est bien, c'est que chacun se démène pour faire au mieux.
"Hey, Momo, l'article sur le mec en Auvergne qui fait des Vincent, là... c'est quoi c'te photo où c'qu'il y a une chaîne sur le coté du moteur, là ? Heu... ça doit être la boîte de vitesses, je pense. Pourquoi, ça urge ? Je veux, Momo ! J'suis déjà grave à la bourre sur c'papier, j'vais encore faire charrette ce soir. Donc, c'est la boîte ? T'es sûr, hein ? Faut pas oublier qu'on est lus par des maniaques qui connaissent tout de leurs caisses à boulons ! Bon, merci... tiens, si t'as le temps, jette un œil à cet article sur les pneus, j'ai pas bien pigé la différence entre les machins tubless et les pas tubless selon le type de jante... demande à Lulu, il fait du vélo le dimanche, il doit savoir..." 