Re: Il est mort
Publié : 28 juil. 2022, 15:55
Si ce pavé issu de Libération est jugé top volumineux par les modos, il suffit de le supprimer.
Cette décision intervient après la rencontre du ministre des Transports, Clément Beaune, avec des membres des Fédérations de motocyclisme et des Motards en colère, fermement opposés au contrôle technique. «Les lobbies ont le droit de s’exprimer et on a le droit de ne pas être d’accord avec eux, concède Tony Renucci, directeur général de l’association Respire. Ce qu’on fustige, c’est la décision du gouvernement qui est illégale, antiécologique et très méprisante puisque nous, on n’a jamais été reçus en grande pompe par le ministre.» Les associations environnementales critiquent une décision allant à l’encontre de l’avis du Conseil d’Etat, qui estimait en mai, dans la lignée de la législation européenne, que «la mise en place du contrôle technique des deux-roues ne peut être décalée au-delà du 1er octobre 2022».
«Source de pollution sonore et de l’air»
«L’enjeu des contrôles techniques, c’est de retirer de la circulation des épaves, c’est-à-dire des véhicules qui ne sont pas aux normes. Ils sont source d’une forte pollution sonore, puisque 80 % des scooters en circulation et 50 % des motos ne respectent pas la norme bruit, mais aussi d’une pollution de l’air», résume Tony Renucci, se référant à une étude de l’International Council on Clean Transportation. En 2019, cette ONG a étudié 3 455 deux-roues parisiens, et a conclu qu’en moyenne les scooters et les motos roulant dans la capitale diffusent onze fois plus de monoxyde de carbone et six fois plus d’oxyde d’azote qu’une voiture essence, alors même qu’ils ne représentent qu’un faible pourcentage des mobilités, «3 %, selon Me Mialot, alors qu’ils constituent 50 % des accidents graves. Même dans des pays qui ont le contrôle technique et où l’accidentalité est forte, elle est sensiblement moins importante qu’en France. Les utilisateurs de deux-roues ont 24 fois plus de chance que les automobilistes de décéder chez nous, alors qu’en Allemagne ou en Espagne, ça tombe à 17».
Des chiffres, le directeur de la Fédération française des motards en colère, Eric Thiollier, en a aussi : «La mutuelle des motards a réalisé une étude qui montre que sur 18 000 cas d’accidents de deux-roues, 0,4 % est dû à une défaillance du véhicule. On fait peser des normes et réglementations sur les motards alors que, dans les deux tiers des cas, ils ne sont pas responsables des accidents. On en est à la dixième réforme du permis moto : on en a ras le bol, alors lâchez-nous la grappe !» s’emporte ce motard de la première heure, cycliste à ses heures perdues.
Bras de fer
Appliqué dans vingt-trois pays européens, parfois depuis plusieurs dizaines d’années, le contrôle technique relève en France d’un véritable bras de fer entre le gouvernement et les associations de défense de l’environnement, et ce depuis 2007. Le 9 août 2021, la saga reprend de plus belle avec l’instauration du contrôle technique, qui provoque un tollé chez les motards. Parmi eux, Jean-Marc, qui habite l’Isère et utilise quotidiennement sa Honda CB650F pour se rendre au travail : «Je ne suis pas pour le contrôle technique pour la simple raison que dans la plupart des cas, un motard est un passionné, donc il entretient bien sa moto. Nous n’avons pas de carrosserie pour nous protéger mais seulement l’entretien de la moto et notre équipement.» Face à la levée de boucliers, la mesure est donc «suspendue jusqu’à nouvel ordre» deux jours plus tard par le président de la République en personne, au motif que «ce n’est pas le moment d’embêter les Français», avait rapporté l’AFP. «Une volte-face», pour Tony Rennucci et ses homologues, qui avaient alors saisi une première fois le Conseil d’Etat afin de contraindre le gouvernement.
Mais mardi, rebelote. Le ministre des Transports, Clément Beaune, enterre définitivement le décret qui devait obliger les conducteurs de motos et de scooters à faire réviser leurs bécanes à partir de 2023. «Plutôt que le contrôle technique, le gouvernement défend des mesures alternatives, environnementales et de réduction des nuisances, que nous discutons avec les acteurs concernés et nos partenaires européens, avec des exigences partagées de sécurité», annonce le ministère, en référence à une directive européenne datant de 2014. Celle-ci offrait la possibilité aux Etats membres de l’Union européenne de déroger au contrôle technique, si des mesures favorisant la sécurité routière et la réduction d’émissions étaient adoptées avant le 1er janvier 2022. Alors pour Me Mialot, les déclarations du ministre des Transports ont des accents de péremption : «Les mesures alternatives, c’était avant. Maintenant, c’est trop tard. Clément Beaune nous dit qu’il va “réfléchir” à des mesures, ce qui est un aveu clair que ça n’a pas été fait. En essayant de jouer la montre, l’Etat viole le droit de l’Union européenne. Et ce pour un microproblème, auquel s’oppose une minorité de personnes.» En novembre 2021, le ministère des Transports avait annoncé quelques mesures comme des radars d’émissions sonores ou la prime à l’achat d’un modèle électrique, qui pour Eric Thiollier est «une nécessité» : «L’écologie est une cause noble, on est tout à fait d’accord avec ça. Mais on ne peut pas nous accuser de trop polluer sans nous donner les moyens de renouveler notre parc.»
«Abus de pouvoir»
Alors, fin du feuilleton ? Pas vraiment. Hier, soit vingt-quatre heures après la déclaration du ministre des Transports, le Conseil d’Etat sème le trouble en publiant une décision jugeant illégal le report du contrôle technique des deux-roues, dans un langage technocratique que beaucoup ont eu du mal à traduire. L’institution a statué non pas sur la décision ministérielle, mais sur «l’abus de pouvoir» dont a fait preuve l’Etat français en choisissant de modifier les échéances fixées par la directive européenne de 2014, permettant un sursis aux motards. «En annulant le report de calendrier du gouvernement, le Conseil d’Etat impose le contrôle technique», traduit Me Mialot, puisqu’il donne la primauté à la directive européenne. «Le gouvernement doit donc l’appliquer sans délai», revendique Tony Renucci. Si le directeur général de Respire parle de «victoire», la décision de la plus haute juridiction française n’a toutefois pas de valeur punitive.
La balle est donc de nouveau dans le camp du Conseil d’Etat, qui doit désormais délibérer sur la toute récente abrogation décrétée par l’Elysée, ainsi que dans celui de la Commission européenne, qui, à en croire Me Mialot, «pourrait bien saisir la Cour de justice de l’Union» pour «punir» le gouvernement et le contraindre «à mettre en place le contrôle technique sans délai».
Cette décision intervient après la rencontre du ministre des Transports, Clément Beaune, avec des membres des Fédérations de motocyclisme et des Motards en colère, fermement opposés au contrôle technique. «Les lobbies ont le droit de s’exprimer et on a le droit de ne pas être d’accord avec eux, concède Tony Renucci, directeur général de l’association Respire. Ce qu’on fustige, c’est la décision du gouvernement qui est illégale, antiécologique et très méprisante puisque nous, on n’a jamais été reçus en grande pompe par le ministre.» Les associations environnementales critiquent une décision allant à l’encontre de l’avis du Conseil d’Etat, qui estimait en mai, dans la lignée de la législation européenne, que «la mise en place du contrôle technique des deux-roues ne peut être décalée au-delà du 1er octobre 2022».
«Source de pollution sonore et de l’air»
«L’enjeu des contrôles techniques, c’est de retirer de la circulation des épaves, c’est-à-dire des véhicules qui ne sont pas aux normes. Ils sont source d’une forte pollution sonore, puisque 80 % des scooters en circulation et 50 % des motos ne respectent pas la norme bruit, mais aussi d’une pollution de l’air», résume Tony Renucci, se référant à une étude de l’International Council on Clean Transportation. En 2019, cette ONG a étudié 3 455 deux-roues parisiens, et a conclu qu’en moyenne les scooters et les motos roulant dans la capitale diffusent onze fois plus de monoxyde de carbone et six fois plus d’oxyde d’azote qu’une voiture essence, alors même qu’ils ne représentent qu’un faible pourcentage des mobilités, «3 %, selon Me Mialot, alors qu’ils constituent 50 % des accidents graves. Même dans des pays qui ont le contrôle technique et où l’accidentalité est forte, elle est sensiblement moins importante qu’en France. Les utilisateurs de deux-roues ont 24 fois plus de chance que les automobilistes de décéder chez nous, alors qu’en Allemagne ou en Espagne, ça tombe à 17».
Des chiffres, le directeur de la Fédération française des motards en colère, Eric Thiollier, en a aussi : «La mutuelle des motards a réalisé une étude qui montre que sur 18 000 cas d’accidents de deux-roues, 0,4 % est dû à une défaillance du véhicule. On fait peser des normes et réglementations sur les motards alors que, dans les deux tiers des cas, ils ne sont pas responsables des accidents. On en est à la dixième réforme du permis moto : on en a ras le bol, alors lâchez-nous la grappe !» s’emporte ce motard de la première heure, cycliste à ses heures perdues.
Bras de fer
Appliqué dans vingt-trois pays européens, parfois depuis plusieurs dizaines d’années, le contrôle technique relève en France d’un véritable bras de fer entre le gouvernement et les associations de défense de l’environnement, et ce depuis 2007. Le 9 août 2021, la saga reprend de plus belle avec l’instauration du contrôle technique, qui provoque un tollé chez les motards. Parmi eux, Jean-Marc, qui habite l’Isère et utilise quotidiennement sa Honda CB650F pour se rendre au travail : «Je ne suis pas pour le contrôle technique pour la simple raison que dans la plupart des cas, un motard est un passionné, donc il entretient bien sa moto. Nous n’avons pas de carrosserie pour nous protéger mais seulement l’entretien de la moto et notre équipement.» Face à la levée de boucliers, la mesure est donc «suspendue jusqu’à nouvel ordre» deux jours plus tard par le président de la République en personne, au motif que «ce n’est pas le moment d’embêter les Français», avait rapporté l’AFP. «Une volte-face», pour Tony Rennucci et ses homologues, qui avaient alors saisi une première fois le Conseil d’Etat afin de contraindre le gouvernement.
Mais mardi, rebelote. Le ministre des Transports, Clément Beaune, enterre définitivement le décret qui devait obliger les conducteurs de motos et de scooters à faire réviser leurs bécanes à partir de 2023. «Plutôt que le contrôle technique, le gouvernement défend des mesures alternatives, environnementales et de réduction des nuisances, que nous discutons avec les acteurs concernés et nos partenaires européens, avec des exigences partagées de sécurité», annonce le ministère, en référence à une directive européenne datant de 2014. Celle-ci offrait la possibilité aux Etats membres de l’Union européenne de déroger au contrôle technique, si des mesures favorisant la sécurité routière et la réduction d’émissions étaient adoptées avant le 1er janvier 2022. Alors pour Me Mialot, les déclarations du ministre des Transports ont des accents de péremption : «Les mesures alternatives, c’était avant. Maintenant, c’est trop tard. Clément Beaune nous dit qu’il va “réfléchir” à des mesures, ce qui est un aveu clair que ça n’a pas été fait. En essayant de jouer la montre, l’Etat viole le droit de l’Union européenne. Et ce pour un microproblème, auquel s’oppose une minorité de personnes.» En novembre 2021, le ministère des Transports avait annoncé quelques mesures comme des radars d’émissions sonores ou la prime à l’achat d’un modèle électrique, qui pour Eric Thiollier est «une nécessité» : «L’écologie est une cause noble, on est tout à fait d’accord avec ça. Mais on ne peut pas nous accuser de trop polluer sans nous donner les moyens de renouveler notre parc.»
«Abus de pouvoir»
Alors, fin du feuilleton ? Pas vraiment. Hier, soit vingt-quatre heures après la déclaration du ministre des Transports, le Conseil d’Etat sème le trouble en publiant une décision jugeant illégal le report du contrôle technique des deux-roues, dans un langage technocratique que beaucoup ont eu du mal à traduire. L’institution a statué non pas sur la décision ministérielle, mais sur «l’abus de pouvoir» dont a fait preuve l’Etat français en choisissant de modifier les échéances fixées par la directive européenne de 2014, permettant un sursis aux motards. «En annulant le report de calendrier du gouvernement, le Conseil d’Etat impose le contrôle technique», traduit Me Mialot, puisqu’il donne la primauté à la directive européenne. «Le gouvernement doit donc l’appliquer sans délai», revendique Tony Renucci. Si le directeur général de Respire parle de «victoire», la décision de la plus haute juridiction française n’a toutefois pas de valeur punitive.
La balle est donc de nouveau dans le camp du Conseil d’Etat, qui doit désormais délibérer sur la toute récente abrogation décrétée par l’Elysée, ainsi que dans celui de la Commission européenne, qui, à en croire Me Mialot, «pourrait bien saisir la Cour de justice de l’Union» pour «punir» le gouvernement et le contraindre «à mettre en place le contrôle technique sans délai».