Restauration d’une AJS M20 de 1950 par John

La passion de la moto ancienne m’a pris un peu par accident pendant l’été 1993. Pourtant à l’époque j’étais plutôt branché custom avec son monde marginal. C’est à dire motos avec cylindres en V, blouson noir, et du monde peu fréquentable.

Un jour, un ami me raconta qu’il avait vu une annonce d’un lot de motos anciennes à vendre, dont mon pote était friand, et de plus très branché des années fifties. Il me proposa une petite balade pour allez voir ces machines, ce que nous fîmes pendant un bel après midi ensoleillé.

 Après un petit voyage dans la campagne vaudoise nous nous sommes arrêtés dans une vieille baraque où le propriétaire nous attendait. Il nous montra ces trésors, sous nos yeux, il y avait trois machines anglaises dans leurs jus d’origine. Une Matchless G9 de 1953, une AJS M18 de 1949 et une AJS M20 de 1950. Mon ami était tout de suite intéressé par la mono AJS, mais nous devions la remorquer. De ce fait, retour sur Genève pour allez chercher mon fourgon de service, que j’avais a l’époque. Pendant le trajet mon copain essaya de me convaincre d’en acheter une, afin qu’on les restaure ensemble. Ce que j’acceptai vu le prix que l’on me proposait. Et mon choix se porta sur l’AJS de 1950, un bicylindre de 500 cm3, étant donné que c’était la plus complète, pour moi, donc la plus intéressante pour une première. Car la Matchless était incomplète et de plus, elle avait une des bougies cassées dans la culasse.

 

La moto n’avait pas de carte grise, mais comme sur l’engin, il y avait encore l’autocollant d’époque d’un importateur de la région, je la pris quand même, ne me faisant pas trop de soucis.

En Suisse nous avons la chance d’avoir une banque de donnée de tout véhicule immatriculé ou importé, et cela depuis de très longues années.

Grâce au numéro de cadre, et à un petit courrier à la centrale des transports à Berne, j’ai reçu la confirmation qu’elle était bien rentrée en Suisse au début de l’année 1950,  et de ce fait, j’ai pu retrouver le numéro de matricule, chose indispensable pour pouvoir l’immatriculer, cela même sans carte grise.

Je l’achetai donc pour 2000 francs suisses, soit environ 8000 francs français de l’époque. Je la ramenai dans mon local, afin de commencer dans les jours suivant avec un gros nettoyage approfondi, afin de voir plus clair dans quoi je m’embarquais. Comme je travaillais dans un domaine où je connaissais bien les produits de nettoyage industriels, il m’a été facile de nettoyer la vieille graisse et la saleté du temps avec un produit approprié, sans faire de dégât. Elle en ressorti très propre, et je constatai l’usure du temps, mais dans état satisfaisant. Me voilà donc prêt pour un premier check up de la moto.

Petite vidange, contrôle des divers filtres, nettoyage complet du carbu, du réservoir. Un peu d’essence neuve, quelques litres d’huile neuve, bougies remplacées, ouverture de l’essence, titillage du carbu et me voila prêt pour kicker pour la première fois mon AJS. Il me fallu bien dix minutes pour quelle accepte de démarrer. Au premier vrombissement du moteur mon silencieux gauche explosa, et je  retrouvai la chicane a hélice toute rouillée au fond de mon garage. Après 10 minutes d’effort, elle se mit à tourner de mieux en mieux et même à tenir le ralenti sans problème. Résultat absolument envoûtant, et là,  je compris que je venais de découvrir une nouvelle passion. C’était magique.

Je commençai donc la restauration de cette machine mais je décidai de ne pas ouvrir le moteur étant donné qu’il tournait comme il faut, et qu’il n’y avait aucun bruit suspect, donc, je ne voyais pas la nécessité de me rajouter du boulot et des ennuis financiers supplémentaires. J’étais déjà assez surmené comme ça. Mais étant donné l’état général du moteur, je pense qu’il a du déjà être refait une fois, mais que le vendeur a oublié de m’en informer, ou qu’il n’était peut être pas lui même au courant. En effet, il avait déjà lui-même acheté le lot à une tierce personne.

 Je me mis à la recherche de documentation que je trouvais sans problème en Angleterre et via aussi le AJS, Matchless Owners Club a Londres, dont j’appris l’existence au début de ma restauration.

Le démontage de la partie cycle ne me causa aucun souci, mais je dois avouer que le cadre était un vrai puzzle, ainsi que tout ce qui était de la carrosserie. J’emmenai le tout au sablage avant la peinture.

Mais mon plus gros problème fut la restauration du réservoir, car il était tellement cabossé que je ne pus le sauver pour le faire chromer. En effet, un essai préliminaire laissa apparaître tout les raccord à l’étain, et le résultat n’était vraiment pas beau. Bien que j’aie la version de luxe (chromée) qui était à l’époque réservée pour l’exportation, je décidai de le faire peindre en modèle standard (noir), réservé pour le marché anglais.

Les roues ont été envoyées entières avec leurs cotes d’origine chez un spécialiste qui me changea les roulements, me refit la peinture en noir époxy des moyeux, avec fourniture et pose de nouvelles jantes et rayons inox, pour un prix correct. Faire re-chromer le tout m’aurais coûté plus cher.

Plusieurs commandes ont été faites en Angleterre pour des pièces telles que guidon, poignées et caoutchouc divers, selle avec pouf, et des pots d’échappement conformes à l’origine, joints, simering , câbles divers etc.… . Cela se fit sur plusieurs années, car, je dois dire, j’ai pris tout mon temps.

Une fois récupéré la partie cycle et toute la carrosserie peintes dans un joli noir, plus certaines pièces de chez le chromeur, je pouvais commencer le remontage de la machine, grâce à la documentation récoltée. Et au fur et a mesure que le travail avançait, je compris vraiment que ça ne serait pas ma dernière restauration. Remontage du cadre en multiples pièces, avec tous les boulons et écrous re-zingués auparavant. Remontage de la fourche et suspension arrière, le tout avec des joints spi et des roulements neufs. Montage des roues. Je remis le moteur en place, avec sa boite a vitesse  et elle commença vraiment à prendre fière allure. Je ne fis  même pas de montage a blanc, je montai le tout directement, en prenant bien soin de ne rien abîmer, mais, je l’avoue, en me tirant souvent les cheveux, car je n’avais pris aucune note pendant le démontage.

La remise en route ne me posa aucune difficulté, mais étant donnée que je n’avais pas ouvert le moteur, je fis pendant les premiers 500 km plusieurs vidanges complètes afin de bien le nettoyer. En effet, je savais que les canaux graisseux étaient le point faible de ces machines. En n’oubliant évidemment pas de changer tous les filtres.

Aujourd’hui je n’ai toujours pas ouvert le moteur, mais il est vrai que je fais toujours des vidanges très rapprochées.

Afin que le bas moteur ne se remplisse pas d’huile, comme je ne l’utilisais pas souvent, je me décidais à monter un robinet à la sortie du réservoir d’huile. J’ai récupéré un vieux robinet d’essence en laiton dont j’ai agrandi le débit. J’ai relié le tout à un coupe contact maison à la masse sur la magnéto, ainsi, aucune peur d’oublier d’ouvrir le robinet. Il m’est arrivé de kicker comme un malade sans avoir ouvert mon robinet, et elle ne voulait rien savoir. C’est la preuve que mon astuce fonctionne bien.

Après plusieurs années d’utilisation, je découvris dans une bourse un réservoir Chromé de 1951. La seule différence c’est qu’il avait des logos ovales alors que sur l’original, il y avait normalement des transferts. Comme j’avais toujours en tête de mettre la moto dans sa configuration d’origine, je l’achetai et le montai sur ma belle avec quelques retouches de peinture. Je roulai pendant un bon moment, mais des fissures sont apparues autour des fixations du logo droit, où j’ai eu des fuites d’essence. Alors  je remontai le réservoir d’origine. Mais ce n’était que partie remise.

Après plusieurs montages à blanc afin de trouver les bons systèmes d’attache (quatre points) et de réglage, tout partis en peinture. Et le remontage fût très excitant car mon fils compris que c’était surtout pour lui que je fis tous ces travaux.

L’homologation du side-car ne fut qu’une formalité, car Moto Village me fit une attestation de montage et le Club officiel de la marque AJS et Matchless me firent un certificat de conformité, que le cadre était prévu pour être attelé à l’origine. J’avais juste dû rajouter un phare avant et arrière supplémentaire sur le panier. Que j’ai vite enlever après l’homologation.

Les premiers tours de roue en side furent très difficiles car ça n’avait plus rien à voir avec la moto. Et je n’avais jamais connu cette expérience.

Mais la joie de pouvoir se balader en famille, compensait l’effort physique que cela nécessitait de rouler en Side-Car. De plus même mon père, motard à l’époque, se fit une grande joie de grimper dessus.

Le seul regret que j’ai aujourd’hui, c’est que faute de débutant je n’ai pas pris de photos avant et pendant ma restauration. Mais bon étant donné le résultat final je pense que je suis pardonné.

 John OSWALD    le 07 03 2005

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